JUSTICE ET DROITS DE L'HOMME à MADAGASCAR

Publié le par Justmad

SURVOL HEBDO 09/2011 - DU 28 FEVRIER AU 6 MARS

http://justmad.canalblog.com/archives/2011/03/06/20542040.html

 

La crise politique

  ±Les trois mouvances et les pro-régimesdurcissent le ton à l’annonce du bouclage imminent de la feuille de route. L’un et l’autre camp fait un pas en arrière, s’écartant d’un éventuel point de consensus. La tension était palpable à l’issue de deux rassemblements qui se sont tenus de manière concomitante. Les partis favorables à la signature de la feuille de route se sont retrouvés au CCI d’Ivato, tandis que les 3 mouvances se donnaient rendez-vous à Ivandry.

 

±Les partisans du régimeconfirment leur volonté de garder les acquis de la feuille de route dans sa forme actuelle et refusent toute reprise du dialogue. Ils rejettent notamment la proposition de Marc Ravalomanana de réunir un Sommet à Antananarivo et suspectent l’ancien président (ainsi que son allié du moment, Albert Zafy) de vouloir prolonger la crise. L’Express, excédé, écrit : « Cela ne finira donc jamais ! ». Le quotidien fustige la classe politique qui multiplie depuis 2 ans les rencontres en tous genres et renie les engagements pris. Cette proposition de Sommet figure dans le communiqué commun publié par Marc Ravalomanana à l’issue d’une nouvelle rencontre avec Joachim Chissano. La presse pro-régime est préoccupée par la complicité apparente entre le médiateur en chef et l’ancien président. Les deux personnalités ne tiennent pas le même discours, la version initiale de la feuille de route présentée le 16 février par le Dr Simão a été jugée abusivement favorable au régime. Les pro-HAT lancent un ultimatum à la communauté internationale pour la contraindre à valider le document initial. Ils « invitent » Leonardo Simão, assisté par les chancelleries étrangères, à organiser une cérémonie officielle de signature avant le 8 mars.

 

±Les participantsà la rencontre d’Ivato ont convenu de jumeler les élections présidentielles et législatives et de les organiser au mois de septembre, un délai jugé trop court par l’ensemble de la communauté internationale, qui estime le délai nécessaire à 11 mois. La CENI juge le délai « jouable ».

 

±Pour les trois mouvances, « il s’agit de garder le dynamisme né depuis Ivato le 19 février » [date du retour manqué de Marc Ravalomanana qui avait mobilisé la foule de ses partisans], déclare un porte-parole. Elles appellent à une nouvelle transition. « Vous allez vous préparer. Nous, dirigeants, allons également nous préparer car nous allons incessamment mettre en place les structures de la Transition », a déclaré Albert Zafy, au nom, affirme-t-il, des 3 mouvances. « Désormais, chacun peut mettre en place les structures étatiques car ni le gouvernement ni le Congrès ni le CST ne sont plus légaux. […] Les deux années accordées par l’ancien président Ravalomanana au directoire militaire pour organiser les élections sont écoulées. Il en est de même des 18 mois prévues par la HCC pour la durée de la transition», a-t-il ajouté. Albert Zafy, défiant le régime, évoque une marche pour la remise d’un document renfermant la position des trois entités au siège du Pnud et auprès de l’ambassade des Etats-Unis.

 

±Le camp Ravalomananadévoile ses propositions. En dépit du regain de tension, la mouvance a remis ses propositions d’amendements de la feuille de route à Leonardo Simão. Elle suggère, entre autres, le retour de l’ancien président avant les élections, et soutient la nomination d’un Premier ministre issu de ses rangs ou issu des trois mouvances. Marc Ravalomanana fait appel au juriste sud-africain Brian Currin pour appuyer sa contre-offensive. Le négociateur est arrivé à Madagascar et a engagé des contacts. En 1994, Nelson Mandela avait fait appel à lui pour la création de la Commission « Vérité et Réconciliation ».

 

±Leonardo Simãoa tenté de lever les malentendus nés de son communiqué conjoint avec Marc Ravalomanana, en rappelant que dans le processus de dialogue sur la feuille de route, il y a deux étapes. La première consiste en une déclaration des partis politiques qui se déterminent quant à leur participation au processus. La déclaration conjointe se réfère à cette première étape. La seconde consiste, pour les formations parties prenantes, à étudier et faire des propositions d’amendement, une phase qui n’est pas encore achevée. La décision de la Sadc sur la crise à Madagascar devrait être prise au cours d’une réunion sur la coopération en matière de défense et de sécurité de la Sadc, qui aura lieu le 18 mars. La signature de la feuille de route définitive devrait se faire avant cette date.

 

±Le Groupe International de Contact (GIC-M) soutient les efforts de médiation de la Sadc, indique un communiqué conjoint des ambassadeurs concernés. Le GIC « invite tous les partis malgaches concernés à cesser toutes les manœuvres de déstabilisation ». Puis, il « appelle tous les acteurs politiques malgaches à coopérer de bonne foi avec le Dr Simao, pour aboutir à la finalisation urgente de la feuille de route ».

 

±La CNOSCappelle tous les politiques à revenir à la raison. « La CNOSC a toujours appelé toutes les forces politiques à s'entendre pour une issue consensuelle à la crise », déclare un porte-parole. Les résolutions d'Ivato qui mettent la pression sur la médiation internationale afin de procéder sans délais à la signature de la feuille de route, ainsi que celles adoptées par les partisans des anciens présidents à Ivandry sont toutes fustigées. « Toutes ces mesures ne garantissent guère l'apaisement ni la réussite d'une feuille de route concertée », a souligné Velompanahy Aristide. Ainsi, pour la CNOSC, « le dialogue reste la seule solution à la crise politique ».

 

±La mesure d'interdictionde retour de Didier Ratsiraka provoque l’émoi dans la classe politique. Malgré son titre de vice-président du CST, son neveu, Roland Ratsiraka, a dénoncé de manière catégorique le « notam » adressé aux compagnies aériennes. Pour lui, c’est une décision qui ne va pas dans le sens du respect des valeurs démocratiques et qui ne favorise pas l'apaisement. Pour le sociologue Paul Rabary, c’est une maladresse stratégique. Le porte-parole de la mouvance rappelle que Didier Ratsiraka est tenu au devoir de réserve en France et ne peut donc communiquer sur les propositions qu’il compte formuler.

 

±Pierrot Rajaonarivelocandidat à la présidentielle. Le président du Mouvement pour la Démocratie à Madagascar (MDM) et secrétaire national de l’AREMA, a saisi l’occasion du rassemblement des formations pro-régime d’Ivato pour officialiser sa candidature. C’est la première annonce d'un « gros » candidat à la présidentielle mais c'est aussi un candidat qui n'a pas légalement la possibilité de se présenter puisqu'il est sous le coup d'une condamnation. Il a contribué à l’adoption par le régime du principe d’élections présidentielles et législatives jumelées, en septembre, conformément à la préconisation de Leonardo Simão.

 

±Attentat manquécontre Andry Rajoelina. Une bombe artisanale a explosé sur le trajet du cortège du président de la Transition, sans faire ni victime ni dégât. Le pouvoir soupçonne l’opposition, qui vient de décider la mise en place d’une « transition parallèle ». Comme lors de l'affaire dite « des bombes artisanales », cette tentative risque de radicaliser les positions de part et autre, à un moment jugé crucial pour la sortie de crise. La Présidence dénonce une « succession d'actes de déstabilisation » orchestrés par l’opposition. La tentative d’attentat serait, pour le pouvoir, la conséquence du piètre comportement de la communauté internationale et de ses atermoiements. Le responsable de la sécurité présidentielle est limogé, il est remplacé par « un spécialiste de la lutte anti-terroriste ».

 

 Droits humains, gouvernance

 

 ±Fetison Rakoto Andrianirina, président du « Comité de solidarité aux victimes du non-droit » réclame le retour des deux anciens présidents. Il déclare en outre qu’il est «inacceptable d’admettre qu’Andry Rajoelina puisse se présenter à la présidentielle alors qu’il s’est solennellement engagé à y renoncer. […] L’exclusion de Ravalomanana et de Ratsiraka du processus n’apportera certainement pas la paix et ne résoudra pas la crise », a-t-il soutenu. Le Comité poursuit son lobbying auprès des instances internationales pour obtenir la libération de tous les détenus politiques et la réouverture des stations radios fermées pour « raisons politiques ».

 

±Affaire Radio n'ny gasy: la HAT met en cause le pasteur Lala Rasendrahasina. Cette radio « pirate » a vu 7 de ses membres arrêtés pour atteinte à la sûreté de l'Etat, du fait de la teneur des messages de « haine et de tribalisme » qu’elle aurait véhiculés. Le pouvoir met en cause le pasteur, président de la Fjkm et président de la Ffkm, qui avait été brutalisé lors de la prise du pouvoir d’Andry Rajoelina en 2009. Les enquêteurs recherchent d’autres complices, dont deux ex-députés. La station aurait eu un rôle de déstabilisation à jouer le jour du retour de Marc Ravalomanana. Le pasteur dément son implication et doute de la sincérité de l'aveu obtenu de la directrice de l’orphelinat qui a hébergé l’émetteur. La Fjkm a alerté ses partenaires étrangers. La Gazette se pose en défenseur des radios libres. La station n’aurait pas lancé d’appel à la rébellion ni d’encouragement à la violence. Elle n’aurait fait que traiter « de façon irrévérencieuse » des dirigeants de la Transition. Le quotidien milite pour que l’opposition puisse s’exprimer sur les ondes, de même que les Eglises. Il s’étonne que l’enquête soit confiée à la DST, et non à la Justice. Chargée de l’enquête préliminaire, la DST a rendu public le déroulement de l'interrogatoire, ce qui, d'après la défense, enfreint le principe de présomption d'innocence. L’Ordre des avocats a réagi à l’annonce de l’ouverture d’une enquête de la DST à l’encontre de l’avocat de la directrice de l’orphelinat, accusé d’extorsion de fonds, de trafic d’influences et de tentative de corruption des enquêteurs. Son président affirme que les procédures n’ont pas été respectées, de même que la présomption d’innocence de l’avocat.

 

 Economie - Divers

 

 ±Les dégâtsprovoqués sur les infrastructures par le cyclone Bingiza fragmentent les collectivités territoriales et isolent de nombreuses agglomérations. La situation des populations sinistrées, déjà fragilisées en cette période de soudure, serait catastrophique. Des aides d'urgence sont déployées mais elles ne résolvent pas les problèmes structurels qui alimentent l’exode rural vers la capitale. Dans le contexte actuel de flambée des PPN et de difficultés d’approvisionnement, ces populations pourraient, selon certains, être instrumentalisées à des fins de déstabilisation politique.

 

±Le « vary mora »(riz à prix cassé) arrive sur les marchés de la capitale. Il provient d’une livraison de 20.000 tonnes en provenance de Birmanie. Le coût de l’opération est à la charge de l’Etat (9 millions de dollars). L’ingérence de l’État sur le marché du riz ne s'inscrit pas dans le long terme. Il se retirera une fois les prix revenus à la normale, dès que débutera la grande récolte. « Outre les 32.500 tonnes de riz importées par l’État, les importateurs continueront à faire venir du riz, de leur côté. Cela devrait être suffisant pour régulariser le prix », déclare le ministre du Commerce.

 

±L'armée captureles 14 pirates somaliens d’un cargo comorien. Le raid a abouti à la libération de 25 otages. Les pirates, capturés dans les eaux territoriales, et des malgaches étant parmi les otages, seront traduits devant la justice malgache. Ils ont écumé le canal du Mozambique pendant plus de trois mois, avant que leur bateau-mère ne tombe en panne et parte à la dérive. Une « autoroute maritime » dans le canal du Mozambique sera opérationnelle en juin, afin de sécuriser cette voie stratégique et d'améliorer la communication entre les ports et les pays limitrophes lors des interventions en cas de catastrophe maritime.

 

Publié dans Dossier

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